Je suis une poupée. Un vulgaire pantin manipulé dont on a sectionné les fils sans le moindre scrupule. Ainsi je gise sur le sol, dur et froid, la poussière s’accumulant jour après jour, seconde après seconde. Ainsi disposée, j’attends. J’attends le baiser de cet idiot de prince, celui qui osera m’effleurer les lèvres pour emmener mon âme mutilée et émaciée en quête d’un avenir plus radieux. Je suis trop naïve et mes songes trop parfaits. En une phrase : Je suis une poupée. Poupée de cire ou mannequin de porcelaine, quelle qu’elle soit, est constituée d’air. Du vent. Du rien. De toute sa personne, c’est son physique qui attire toutes les convoitises car elle n’est bonne qu’à ça : être enviée et admirée. Sa peau de porcelaine diaphane craint la lumière, son cou gracile et délicat recouvert de ce doux voile. Sa chevelure bouclée chatouillant ses hautes pommettes rosées porte la couronne virginale. Elle paraît et tous les regards se tournent vers elle, c’est comme ça qu’on la perçoit, comme un sex-appeal. Je suis un sex-appeal. Un sex-appeal révolté contre cette existence qui n’est qu’errance perpétuelle. Tout n'est qu'hypocrisie et préjugés. Lorsqu'on s’offre à vous, on parait doux, beau et gentil. Mais ils cachent bien leur jeu, jouissant d'un pouvoir chimérique. En réalité, lorsqu'on est devenu inutiles, quand on se languit trop, on vous jette. Comme une vulgaire clope consumée, qui aurait perdu sa saveur. C’est dans ces cas là qu’on espère être une douceur au goût si acidulé qu’il persisterait dans la bouche. On ne croque pas la vie à pleines dents. C’est elle qui nous bouffe, en vérité, sans qu'on s'y oppose. Je pensais être une de ces douceurs uniques et si rares. Je pensais que j’étais importante. Je ne demandais qu’à captiver l’attention, rien qu’une minute, rien qu’une seconde durant laquelle ils se seront tous dit que j’étais la plus belle chose qu’ils n’aient jamais croisée de toute leur existence. Peut-être était-ce trop demander ? Peut-être était-ce trop espérer ? J’ai la folie des grandeurs et je le sais. Je suis une égoïste.

« Est-ce que tu me trouves jolie ? » « Oui, tu es parfaite, on peut y aller maintenant ? » Quinn eut un léger froncement de sourcils et s’humecta les lèvres devant la moue que faisait sa jeune sœur. Elle aurait voulut lui faire comprendre qu’une femme se devait d’être parée et élégante en n’importe quelle situation mais Diana n’aurait pas fait le rapprochement, elle, qui traînait tout le week-end dans un pyjama rose débraillé et attachait négligemment sa crinière blonde en un gros palmier qui ne ressemblait... à rien, justement. Diana avait toujours envié sa sœur, personne ne le savait. Quinn était jolie, c’était un fait. Grande et mince, elle surplombait et dominait chaque endroit où ses escarpins avaient le privilège d’être aperçus. Elle était une gracieuse poupée de porcelaine dont elle en avait hérité le teint. En plus d’être une petite beauté, mademoiselle était la fille idéale, polie, spontanée, studieuse. « Allez, dépêche, on va finir par rater le train ! » « Oh, fiche moi la paix et retourne à tes occupations la morveuse, tu vois bien que je suis occupée. » C’est dangereux d’être coquette, au point de n’en faire qu’à sa tête. Egalant son narcissisme ignoré, se cachait derrière cette enveloppe charnelle des plus avenantes des noirs secrets que jamais personne ne devait avoir connaissance. Si Quinn donnait le reflet d’une sainte, il en était tout autre. Elle était loin d’être polie, spontanée et studieuse comme se vantait ses parents auprès de leurs amis. Quinn était une calamité, une petite terreur. Diana pouvait en témoigner, elle la voyait souvent en train de cogner ses rivales. Ce qui excitait son aînée, c’était les duels, pas ceux avec les baguettes, ils n’étaient pas très drôles. Ce que Quinnie préférait, c’était la boxe moldue et elle ne se contrariait pas de le faire savoir aux pauvres victimes qu’elle avait déjà expédié au tapis. Studieuse, loin de là, elle martyrisait ses condisciples les plus doués pour obtenir une note convenable. Elle ne s’intéressait pas aux études, son reflet et ses invitations occupaient une place plus importante dans l’ordre de ses priorités. Pourtant, dans l’ensemble, Quinn n’était pas une fille méchante. Elle sortait énormément, un peu trop d’ailleurs, fêtait jusqu’à pas d’heure, avait une tonne d’amis et elle était même assez populaire à Poudlard. On la décrivait comme drôle et déjantée. Un tout autre portait que celui que connaissait la pauvre Diana qui s’était mainte fois interrogée sur la véritable identité de sa sœur.